Historique des greffes de trachée
A l’occasion de différents articles relatifs à la greffe de trachée, plus particulièrement avec les espoirs suscités par l’utilisation de cellules souches, le Dr Michel CORNIGLION nous dresse un petit historique de cette greffe.
Les greffes de trachée
La trachée est un conduit peu banal !
Avec l’utilisation des cellules souches, l’espoir renait aujourd’hui pour de nombreux patients.
L’exposé tout à la fois anatomo-physiologique, l’évolution des techniques chirurgicales et l’apport de la biologie, permettent de comprendre la problématique que soulève ces greffes que l’on aurait pu croire simples.
Anatomophysiologie
La trachée, appelée par les anciens trachée artère (ils croyaient que les artères servaient à conduire l’air), est un conduit fibro-cartilagineux renforcé d’anneaux cartilagineux en fer à cheval de 15 mm de section en moyenne. La paroi postérieure, située en avant de l’œsophage, est musculaire ; sa contraction fait varier le calibre trachéal. La trachée est flexible : elle suit les mouvements du cou et de la déglutition. La longueur de la trachée est de 12 à 15 cm. Elle conduit l’air du larynx aux 2 bronches souches.
Les cellules tapissant sa surface sont ciliées, elles sécrètent du mucus s’opposant à la pénétration des bactéries et virus, tout en repoussant vers l’extérieur les particules étrangères. Chez le fumeur, les cils disparaissent, les fonctions sont altérées.
Les principales indications de greffe de trachée :
– le cancer de la trachée,
– le cancer de la thyroïde envahissant la trachée par voisinage,
– les destructions de la trachée : traumatisme, infection…
– la bronchomalacie, qui est une faiblesse des anneaux cartilagineux entrainant une réduction considérable du calibre de la trachée,
– les malformations chez les enfants.
Les techniques
– Première allogreffe de trachée en 1979 (pour mémoire : une allogreffe est une greffe entre 2 êtres de la même espèce, alors qu’une xénogreffe est une transplantation entre des espèces proches mais différentes, par exemple porc/homme). Les résultats de ces premiers essais ne sont pas satisfaisants, par défaut de vascularisation à cause de la taille des vaisseaux, de sténose, de nécrose et de rejet, car les cellules de la muqueuse sont très antigéniques.
– Allogreffes après déspécifications (1999 – rapport mondial – Pr Jacob et coll). Pour détruire les cellules viables et les antigènes, on place pendant 3 mois les trachées prélevées dans différents bains (formaline, thimerosal, acétone). Les suites opératoires de la transplantation sont émaillées de nombreuses complications : tissus de granulation entrainant des obstructions secondaires, sténose, mises en place de canules …
– Remplacement de la trachée par allogreffe aortique (2005 à Lille – Pr Wurtz). L’aorte prélevée sur des donneurs décédés n’induit pas de rejet et se transformerait progressivement en trachée. Une endoprothèse est nécessaire.
– Greffe de trachée associée à un ensemencement en cellules souches (2008 – équipe internationale – Suède, Italie, Espagne – Pr Macchiarini). Après un prélèvement de trachée chez une personne décédée, celle-ci est décellularisée puis réensemencée par des cellules souches provenant du receveur lui-même. 2 ans plus tard, il a été observé une reconstitution d’un épithélium cilié avec des glandes séro-muqueuses. Il n’y a pas de rejet malgré l’absence de traitement immunothérapique.
– Greffe de trachée artificielle autologue (2010 – par une équipe française – Pr Dartevelle). A partir des propres tissus des patients (peau et cartilage), les chirurgiens fabriquent un tube trachéal de remplacement. Il n’y a – évidemment – pas besoin de traitement immunosuppresseur puisque les tissus proviennent du patient lui-même.
– Greffe de trachée synthétique (2011 – Suède, Angleterre – Pr Macchiarini). A partir de scanner en 3D, il a été réalisé en plastique biocompatible la reproduction exacte de la trachée du futur opéré. Parallèlement, à partir de la moelle osseuse du patient, il a été procédé à l’extraction de cellules souches. A partir de ces cellules souches, il est obtenu en laboratoire, des cellules de trachée qui sont ensemencées sur la trachée artificielle.
Docteur Michel CORNIGLION,
administrateur national, responsable médical au sein de FRANCE ADOT
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